L'incident le plus récent a eu lieu le 15 février 2021 lorsque les autorités policières ont fait une descente à l'Université de San Carlos à Cebu City et ont arrêté 26 personnes, dont 19 mineurs. Les 19 mineurs Lumad sont toujours détenus par la Police Nationale Philippine (PNP), tandis que les sept autres, composés de trois élèves Lumad, de deux dirigeants Lumad et de deux enseignants bénévoles des écoles Lumad - sont détenus et accusés d'enlèvement et de graves infractions de détention illégale. La police affirme que les enfants qu’elle a placés en détention ont suivi «une forme d’entraînement à la guerre». Cela a été démenti par les enfants eux-mêmes et confirmé par le Département de la Protection Sociale et du Développement (DSWD), qui a déclaré que les enfants apprenaient à lire et à écrire. Les écoles de Lumad ont longtemps été attaquées et menacées sur la base des rapports sans fondement de l’État liant les écoles à des groupes terroristes.
Cet incident a été précédé d'une série d'autres criminalisations et attaques contre les Peuples Autochtones aux Philippines. En moins de deux mois, nous avons tous été témoins des terribles attaques perpétrées contre eux par l'État, qui ont abouti au meurtre et à l'arrestation de plus de 50 personnes autochtones aux Philippines.
On peut rappeler qu’en date du 30 décembre 2020, neuf autochtones Tumandok ont été tués et 16 autres arrêtés lors d'une opération menée par un contingent conjoint de la PNP et des Forces Armées des Philippines (FAP) dans les communautés Tumandok d'Iloilo. Les personnes tuées et arrêtées étaient des dirigeants et des membres de l’organisation Tumanduk, une alliance de 17 communautés autochtones des provinces de Capiz et Iloilo. Ils étaient des leaders autochtones bien connus dans leurs barangays respectifs qui s'opposaient à la militarisation et aux violations des droits dans leurs communautés et étaient actifs dans la lutte contre l'accaparement des terres et la construction du Méga Barrage de Jalaur à Calinog, Iloilo.
Les dirigeants autochtones Betty Belen et Windel Bolinget et leur organisation, Cordillera Peoples Alliance (CPA), ont également été victimes de diverses attaques. Belen a été arrêtée lors d’une incursion tôt le matin par des éléments conjoints de la PNP, du Groupe d'Enquête et de Détection Criminelle (CIDG) et des FAP dans sa communauté le 25 octobre 2020. Elle a été accusée de possession illégale d'armes à feu. Son affaire a été classée le 11 février 2021 pour absence de fondement juridique du mandat de perquisition ayant conduit à son arrestation. Bolinget, en revanche, est actuellement inculpé pour un présumé meurtre survenu à Davao del Norte (sud des Philippines), un endroit qu'il n'a jamais visité dans sa vie.
À Zambales, 4 Aetas autochtones sont également arrêtés le 21 août 2020 et font actuellement l'objet de poursuites. Deux d’entre eux sont des mineurs et femmes, et les deux autres sont des hommes et sont les premiers à être inculpés en vertu de la loi antiterroriste. Avant d'être remis par les FAP aux autorités judiciaires, les deux hommes ont été torturés pendant plusieurs jours.
Nous dénonçons les attaques apparemment incessantes contre les peuples autochtones, en particulier à un moment difficile où le peuple philippin, en particulier ceux des secteurs marginalisés comme les peuples autochtones, est aux prises avec les impacts de la pandémie à COVID-19 et est pris dans la plus longue période de confinement au monde. Ces attaques sont évidemment artificielles et organisées dans le cadre du programme anti-insurrectionnel du gouvernement. Malheureusement, les peuples autochtones sont parmi les plus touchés par les attaques de l'État.
Nous exhortons le gouvernement philippin à rester fidèle à son obligation de protéger et de respecter les droits des Peuples Autochtones, comme il l'a souligné en réaffirmant son engagement à mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Autochtones (DNUDPA), sa Constitution et sa législation nationale. Nous les exhortons à abandonner immédiatement les accusations forgées de toutes pièces contre les peuples autochtones arrêtés. Une enquête indépendante doit être immédiatement ouverte pour déterminer la responsabilité et la culpabilité. Ces attaques doivent cesser, MAINTENANT!
Nous restons fermes à soutenir le mouvement des peuples autochtones aux Philippines qui persévèrent avec un courage inébranlable dans la défense de leurs droits sur leurs terres, territoires et ressources ancestraux, l’autodétermination et l’accès à une éducation de qualité.
Nous appelons tous les mouvements de peuples autochtones du monde entier à s'unir pour amplifier les appels à la justice aux victimes de la criminalisation et de l'impunité.